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Chers parents.

Temps de lecture : 5 minutes
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Lettre ouverte, par Isabelle Bastien

Chers parents d’athlètes,

Je m’adresse à vous aujourd’hui.

Le sport est un jeu et devrait le rester pour que votre enfant puisse s’y épanouir pleinement. La victoire à tout prix, le nombre de buts comptés, la sélection dans telle équipe, les minutes de jeu, ne devraient pas être l’objectif ultime de la participation sportive, surtout pour des jeunes qui sont en apprentissage.

Je suis encore une fois choquée d’entendre des histoires de parents toxiques dans les milieux sportifs. Choquée et déçue que des adultes, censés être des modèles pour leurs enfants, s’engagent dans des comportements nuisibles au détriment du bien-être de leurs enfants.

Le plus récent exemple fut décrit par le journaliste Mikaël Lalancette dans Le Soleil le 28 juillet dernier sur des situations survenues aux Jeux du Québec qui se déroulent présentement à Trois-Rivières.

Comment faire comprendre aux parents toxiques qu’ils sont toxiques?

Forte de quatre ans d’expérience dans la gestion de centaines de plaintes d’abus, harcèlement, négligence et violence dans les sports et loisirs au Canada, étant moi-même ancienne athlète et mère de deux enfants ayant pratiqué beaucoup de sports d’équipe, je peux affirmer que certains parents sont la source de problèmes dans les milieux sportifs et ceux qui en payent le prix, ce sont les jeunes athlètes, les arbitres et les entraineurs.

Alors cher parent, j’aimerais que tu portes attention aux prochaines lignes.

Quand tu cris et sacres à plein poumon dans les estrades dans un match de niveau Timbits, c’est toxique. Quand tu écris à l’entraineur de ton adolescente à n’importe quelle heure de la journée pour lui dire comment faire son travail, c’est toxique. Quand tu engueules et menaces un arbitre, souvent d’âge mineur, c’est toxique. Quand tu en viens aux coups avec les parents de l’équipe adverse pendant ou après un match, c’est toxique. Quand tu calcules le nombre de minutes de jeu de ton enfant et celui des
autres, c’est toxique. Quand tu critiques ouvertement l’entraineur de ton enfant, c’est toxique. Quand tu dénigres une équipe après un match, c’est toxique. Quand tu cries des insultes racistes ou homophobes à un enfant, c’est toxique. Quand tu t’ingères dans les stratégies de coaching, c’est toxique. Quand tu mens sur la condition physique de ton enfant pour le faire jouer, c’est toxique et surtout négligent, voire dangereux.

Les exemples sont trop nombreux pour tous être nommés mais ce sont tous des exemples réels. Sache que par tes paroles et actions inappropriées, tu crées des malaises, tu blesses des gens, tu fais peur aux enfants, tu donnes le mauvais exemple, tu intimides inutilement et tu détruis des rêves.

Ces actions nocives sont significatives et peuvent résulter en des conséquences graves dans le milieu sportif. J’ai vu des enfants arrêter leur sport par démotivation et/ou en raison de la pression indue de leurs parents. J’ai vu des arbitres quitter leurs fonctions d’arbitre qu’ils aimaient. J’ai vu des entraineurs démissionner à cause de la pression et du comportement harcelant de certains parents. J’ai vu des conflits internes entre des parents et des clubs qui ont pourri l’expérience sportive de leur enfant.

Alors cher parent, laisse ton enfant jouer. Laisse-le avoir du plaisir avec ses amis. Laisse-le vivre ses échecs. Laisse-le pleurer. Laisse-le se relever lui-même. Tu n’as pas besoin de tout gérer pour lui. Tu n’as pas besoin d’aller à tous ses entrainements. Fais confiance aux entraineurs. Ne crie pas sur ton enfant ou sur les autres enfants. Contrôle tes émotions. Respecte les arbitres, ils font leur gros possible. Ne calcule pas chaque minute que ton enfant joue. Apprécie plutôt le fait qu’il est heureux quand il joue. Encourage positivement tous les enfants. Finalement, prends quelques minutes pour relire ton code de conduite des parents, c’est toujours bon de se rafraichir la mémoire.

Si tu n’es pas certain que le chapeau te fasse, pose la question à ton entourage…tu auras peut-être comme réponse que tu es « un peu intense ». Il sera alors temps de prendre un pas de recul et réfléchir à tes actions et ce, pour le bien-être de ton enfant et son développement sportif.

De plus, si au terme de ta réflexion tu reconnais que tes paroles ou tes actions auraient pu blesser ou déranger quelqu’un, rappelle-toi que l’action de s’excuser peut créer un bien immense à la personne qui reçoit tes excuses. Ça prend une bonne dose d’humilité et de courage de reconnaitre ses torts mais c’est très gratifiant par la suite. Essaie-le,
juste pour voir.

Enfin, rappelons-nous que chaque acteur du milieu sportif a sa responsabilité en lien avec les comportements inappropriés de certains parents. Si des interventions positives et bienveillantes ne fonctionnent pas auprès de ces parents toxiques, il existe un mécanisme de plaintes au sein des fédérations sportives.

Bon restant de Jeux du Québec et bons défis sportifs à tous les jeunes athlètes!

 

Isabelle Bastien
Criminologue, retraitée du Service correctionnel Canada
Employée chez ALIAS, ligne de signalement
Administratrice au Conseil du Sport de Montréal
Co-autrice et signataire du Protocole de Montréal pour la bienveillance en sport